La CRÉ laissée dans le noir

Le ministre Pierre Paradis.

Le ministre responsable de l'Estrie s'est arrêté à Sherbrooke, hier, sans toutefois prendre le temps de rencontrer la Conférence régionale des élus de l'Estrie, qui réclame avec insistance d'être rassurée dans les plus brefs délais sur son avenir. Faut-il s'en inquiéter?


« L'avenir que le gouvernement va leur réserver devrait être annoncé normalement avant la confection des prochains budgets municipaux », se borne à dire Pierre Paradis. « C'est M. Moreau (le ministre des Affaires municipales Pierre Moreau) qui va faire ces annonces. »

Le ministre Paradis invoque par ailleurs son agenda bien garni pour excuser le fait qu'il n'a pas encore daigné répondre à la demande de rencontre de la CRÉ de l'Estrie.



« Ils ont demandé une rencontre avec le ministre des Affaires municipales aussi, en temps opportun. Mais on a des agendas serrés (...) et en même temps il faut gérer un ministère qui a un peu plus d'un milliard de budget et 2000 employés », ajoute le titulaire de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, en énumérant les multiples événements auxquels il participera au cours des prochains jours.

Rappelons que le président de la CRÉ de l'Estrie Jacques Demers a adressé une troisième lettre aux ministres Moreau et Paradis la semaine dernière pour que le gouvernement réaffirme son intention de préserver les CRÉ, tout en soulignant leur importance pour les régions.

Même s'il n'a reçu qu'un banal accusé de réception à sa missive, Jacques Demers garde espoir que le tour de la CRÉ viendra.

« Je n'ai pas de difficulté avec le fait qu'on se questionne sur les structures, répète Jacques Demers, mais je pense que la CRÉ est un incontournable pour prendre le pouls de la région, particulièrement dans une période de compressions comme celle qu'on traverse. On est le seul organisme qui fait le lien avec toutes les structures régionales comme l'UPA, les universités, les municipalités et les groupes sociaux. »



Pierre Paradis de son côté ne s'émeut visiblement pas de l'inquiétude de l'organisme régional. « Moi je pense qu'il ne faut pas isoler une structure. Il y a une réalité financière qu'on ne peut pas ignorer, dit-il. (...) On est en période de rééquilibrage budgétaire extrêmement difficile pour 2014-2015 et qui sera encore plus complexe et difficile pour 2015-2016. On ne le fait pas juste pour le fun. »

Les gestes que le gouvernement pose présentement sont difficiles, mais c'est encore lui qui décide des gestes à poser et ça clarifie l'avenir pour les générations qui suivent, fait-il enfin valoir.

Aéroport et Hydro-Sherbrooke

Avant de s'arrêter à La Tribune pour une table éditoriale, Pierre Paradis a toutefois pris la peine de visiter sur sa terre le président de l'UPA-Estrie François Bourassa et de passer par l'archevêché de Sherbrooke. Il a aussi écouté les préoccupations du maire de Sherbrooke, Bernard Sévigny, dont celles liées au dossier de l'aéroport.

À ce propos, le député qui représente la circonscription de Brome-Missisquoi depuis 1980 et qui a donc à ce titre le dossier de l'aéroport de Bromont dans sa cour a refusé de prendre position, ni même de s'engager à exercer des pressions pour faire avancer le dossier sherbrookois en tant que ministre responsable de l'Estrie.

« Moi, je suis ministre de l'Agriculture. Les dossiers d'aéroports, j'en ai deux sur mon bureau à l'heure actuelle et ceux-là touchent le zonage agricole. Pour le reste, je n'ai pas juridiction. (...) Je respecte les gens qui respectent mes juridictions et je fais la même chose », ajoute-t-il, avant d'inviter les journalistes à interpeller les ministres fédéraux Denis Lebel et Christian Paradis.



N'empêche qu'il a été sensibilisé au fait que les deux aéroports se retrouvent en compétition pour la désignation qui leur permettrait d'obtenir des vols de passagers et il reconnaît que ce serait un atout économique important.

« Plus vous avez de moyens de transport et de communications, de l'internet jusqu'à l'avion, mieux vous êtes équipés et plus vous avez de chances de développer. »

Quant à savoir lequel projet, entre Bromont et Sherbrooke, est le plus avancé, il réplique : « Bromont prétend que c'est eux autres et Sherbrooke prétend que c'est eux autres. Moi je les crois tous les deux. »

Par ailleurs, Pierre Paradis révèle que des négociations sont en cours avec le gouvernement et Hydro-Québec pour amoindrir les effets de la nouvelle structure tarifaire approuvée par la Régie de l'énergie qui aurait un impact direct sur les profits d'Hydro-Sherbrooke, de l'ordre de 3,7 M$ en 2015 et jusqu'à 7 M$ en 2017.

« L'Assemblée nationale, c'est une usine à lois. Il faut avoir l'humilité, quand il y a des effets pervers, de reconnaître qu'on n'était pas dans le milieu de la cible et de corriger », dit M. Paradis.