Quand les policiers débarquent

Je me suis attardé un temps devant Notre-Dame avant d'être attiré par les statues se trouvant devant le palais de justice, lui aussi situé sur l'île de la Cité.

J’ai une petite tendance à la curiosité! Qui l’aurait cru? Une petite tendance à être lunatique, aussi, quand je déambule dans une nouvelle ville. Et une petite tendance à me mettre les pieds dans les plats quand je suis lunatique.


Un groupe de journalistes s'installant devant le palais de justice de Paris a piqué ma curiosité.

Paris. Une amie m’hébergeait dans son appartement de Pigalle, rien de moins. J’ai pris mes aises. Je me sentais chez moi au point d’y laisser mon passeport en pleine sécurité. De toute façon, combien de fois m’a-t-on demandé mon passeport à tout hasard en pleine rue?Mon petit bonheur sur le dos, les mains dans les poches, je suis parti explorer. C’était mon deuxième séjour à Paris. Le nez bien en l’air, les yeux grands ouverts, je portais attention aux petits détails, aux scènes de la vie quotidienne. Les sirènes des policiers étaient omniprésentes. Curiosité!

À intervalles réguliers, les autopatrouilles passaient à pleine vitesse près du Panthéon, de l'Arc de Triomphe, du Louvre. Il y avait plus que la routine pour les autorités, mais difficile d'en savoir plus. Je ne cherchais de toute façon qu'à explorer en paix.

Sur l'île de la Cité, je me suis attardé un temps devant Notre-Dame pour admirer ses clochers et ses vitraux comme il se doit, puis, j'ai voulu aller me poser sur un banc du square du Vert-Galant. Mais voilà qu'en chemin, rue de Harlay, mon regard s'est arrêté sur des statues que je n'avais jamais aperçues avant. Trois secondes plus tard, peut-être quatre, j'apercevais une horde de journalistes qui s'installaient. Curiosité!

Regard à gauche. Regard à droite. Rien qui m'empêchait vraiment de m'approcher. Il y a bien quelques policiers qui faisaient des rondes, mais la circulation ne semblait pas entravée.

L'édifice qui attirait l'intérêt de tous n'était rien d'autre que le palais de justice. J'ai décidé de m'installer en retrait. Même en vacances, le journaliste en moi était intrigué par le mode de travail de ses pairs français.

Bien installé sur un banc de parc, je m'interrogeais sur le procès qui méritait une telle attention médiatique. En gardant bien mes distances, j'avais suffisamment de temps pour poursuivre ma route si je jugeais ma présence non désirée.

Mais voilà! C'est qu'en concentrant mon attention sur la foule des médias, j'ai raté l'évacuation du périmètre. Je suis sorti de ma torpeur seulement en voyant trois policiers: deux sur la droite et un sur la gauche, s'approcher doucement.

À mon accent, ils ont bien pigé que je ne venais pas de là. Alors ils ont demandé quoi? Mon passeport, bien entendu. Il n'y a pas de hasard. Huit ans de voyages sac à dos, plus de trente pays visités, il ne m'est arrivé qu'une seule fois de ne pas avoir mon passeport avec moi.

On s'est entendus pour une pièce d'identité. Pendant que je fouillais dans mon sac à dos, les trois gendarmes gardaient une main bien posée sur leur revolver, au cas. Y'avait pas intérêt à faire des conneries.

Après avoir noté mon nom et mon adresse, les trois hommes m'ont intimé de partir. Sur le champ. Et de ne pas repasser par là.

On m'a parlé d'un procès sensible. Que la sécurité avait été renforcée. J'ai disparu en moins de deux. Je n'ai pas réussi à savoir de quel procès il s'agissait.

J'en ai tout de même tiré deux leçons. Mes documents de voyage ne me quittent plus d'une semelle, où que j'aille. J'évite aussi désormais de m'approcher des groupes de journalistes en fonction et des déploiements policiers.

Quelques années plus tard, sur Marienplatz en plein coeur de Munich, un groupe d'amateurs de soccer fraîchement débarqué de Lyon chantait à tue-tête. Leur équipe affrontait le Bayern le soir même. Le groupe était animé. Les forces de l'ordre ont rappliqué.

La curiosité m'attirait vers la foule... Mes jambes m'ont mené dans la direction inverse.

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