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Cette peur en partie justifiée, en partie irrationnelle, vient entre autres des difficultés qui nous forceront à dévier de notre route, à nous poser un instant pour réfléchir, à prendre une décision à laquelle nous ne croyions pas être confrontés. Par-dessus tout, on se demande si on arrivera à se faire comprendre. À comprendre, point, dans un milieu où tout est différent.
J'en entends dire qu'il est imbécile de visiter un pays dont on ne connaît pas la langue. D'autres qui s'empêchent de partir parce qu'ils ne maîtrisent que le français. Il est vrai que les rudiments de l'anglais se limitant à «yes, no, toaster» ne seront jamais d'un grand secours.
Un des problèmes à vouloir apprendre une nouvelle langue, c'est de mémoriser les mots. Et de savoir les reconnaître quand quelqu'un nous parle. On aura beau mémoriser les questions communes comme «Où sont les toilettes?», si on ne comprend pas la réponse, on ne peut pas dire qu'on soit plus avancé.
N'empêche! Quand je suis parti pour l'Asie, je me suis dit que je me débrouillerais. Le mandarin, savez, je n'ai même pas tenté de commencer à le maîtriser. Et il n'y a pas à dire, l'expression «c'est du chinois» porte assurément bien son nom dans l'empire de Mao.
À peine arrivé à Shanghai, première escale dans le grand pays des pandas, j'ai décidé de suivre le conseil d'un autre voyageur et de me diriger vers Hangzhou, reconnue pour ses temples et son magnifique lac.
Si l'anglais était déjà approximatif dans la métropole, à Hangzhou, on me faisait les yeux grands dès que j'ouvrais la bouche. Oh! Oh! Déjà, trouver le bon bus pour quitter la gare a été toute une aventure. Si mon guide de voyage me donnait le numéro du véhicule dans lequel je devais monter, il semble que plusieurs autobus avec le même numéro empruntaient des trajets différents.
En pointant dans mon livre la direction que je souhaitais prendre, une dame a semblé comprendre et m'a fait signe de monter. Maintenant, comment savoir où descendre?
J'ai pris une chance, me suis égaré, et ai suivi les berges du lac pour au moins marcher dans une direction précise. J'ai bien fini par m'acheter une carte de la ville... en mandarin. Pur gaspillage, puisque je n'ai jamais su m'y retrouver.
Au bout du compte, mon sens de l'orientation et plusieurs grands gestes dans un langage des signes rudimentaire m'ont permis de me démêler. L'inscription des noms de lieux en mandarin dans mon Lonely Planet m'aura aussi sauvé la vie quand, d'un air inquiet, on me faisait comprendre que je marchais en sens opposé de ma destination.
Surtout, j'ai réalisé que si je me forçais à me faire comprendre, on se forcerait à interpréter mes gestes en retour. Et qu'on m'aiderait volontiers. Ainsi une autre dame s'est précipitée vers le chauffeur d'un autre autobus pour lui demander de me laisser descendre, alors que je cheminais visiblement sur le mauvais circuit. Chaque minute à Hangzhou a été une épreuve. Un défi qui me poussait à réfléchir différemment, à trouver de nouvelles façons de m'exprimer. J'y suis arrivé!
Quelques semaines plus tard, à Pékin, un nouvel ami a partagé son truc pour identifier la nourriture chinoise. Avec son air le plus taquin, il se dirigeait vers la serveuse du restaurant, pointait un plat du doigt et imitait le bruit d'une vache, prenant bien soin d'y ajouter l'intonation d'une interrogation. Il a repris son manège avec le bruit du cochon et de la poule... Une serveuse amusée lui a répondu en riant, imitant à son tour le son du cochon. C'était donc du porc!
Absurde et ridicule, la situation l'était. Mais nous en avons tiré plusieurs sourires et un repas pour combler notre faim, à l'autre bout du monde. Et bien sûr, une histoire de plus à raconter. N'empêche, j'utilise désormais cette technique quand rien d'autre ne me permet de comprendre le menu.
Pour les plus traditionnels, il existe encore une bonne vieille méthode. À l'hôtel, le personnel qui parle anglais peut écrire dans sa langue, sur un bout de papier, le nom de l'endroit que vous cherchez. Vous pouvez ensuite vous en servir pour communiquer. La carte de visite de l'hôtel demeure également un bon outil à tendre à un chauffeur de taxi quand on s'égare et que la panique cherche à s'installer... Au moins, on revient à bon port.
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