Gaz de schiste: l'évaluation environnementale se fera sans fracturation

L'évaluation environnementale stratégique sur le gaz de schiste se fera sans fracturation, s'il n'en tient qu'au comité chargé de la réaliser.


Le Comité de l'évaluation environnementale stratégique sur le gaz de schiste a rendu public, mardi, son plan final de réalisation qui ne laissera pas grand-chose au hasard, puisqu'il s'attend à produire quelque 70 études pour la rédaction de son rapport, attendu au printemps 2013.

En dévoilant ce plan, le président du comité, Robert Joly, a expliqué qu'on ne recommandera pas au ministre de l'Environnement d'autoriser des projets de fracturation, parce que l'industrie a cessé de faire des demandes d'autorisation pour cette activité depuis plus d'un an et qu'on ne prévoit pas de nouvelle demande dans l'année qui vient.



«On ne peut pas prévoir d'études sur ces fracturations puisqu'on pourrait se retrouver sans aucune donnée, a expliqué M. Joly. Ça nous prenait des façons alternatives de faire. C'est pour ça que nous avons décidé de faire des expérimentations en laboratoire. Nous allons nous servir des données existantes aussi. Il était donc plus simple d'annoncer qu'on ne recommanderait pas de procéder à des fracturations hydrauliques parce que nous avons un plan alternatif.»

Le géologue Michel Malo, également membre du comité, a expliqué que les experts auraient pu obtenir de l'information si une entreprise avait mené ce genre d'activité, mais que le comité ne pouvait lui-même aller faire de la fracturation sur le terrain.

«C'est en dehors de notre mandat (...) Ç'aurait été mal vu de notre part et, de toute façon, ça exige des coûts assez importants de faire de la fracturation hydraulique: c'est quelques millions de dollars. C'est au-delà de notre budget.»

M. Joly a précisé que cela n'empêcherait pas le comité d'obtenir des informations pertinentes de puits de forage déjà en exploitation, puisque le plan prévoit des visites sur des sites en activité ailleurs au Canada et aux États-Unis.



Les puits québécois ne seront pas négligés pour autant puisque le comité a l'intention d'analyser en profondeur ceux qui présentent des fuites, notamment ceux des firmes Talisman et Canbriam, respectivement situés à Leclercville, près de Lotbinière, et à La Présentation, près de Saint-Hyacinthe.

Les experts entendent par ailleurs préciser la notion d'«acceptabilité sociale» qui entoure le développement de la ressource.

«En ce moment, le débat est très polarisé, donc, on a l'impression que c'est simple, mais si vous allez sur le terrain et vous essayez de comprendre le pourquoi des objections, ça se présente d'une façon générale beaucoup plus complexe que l'image qu'on en a», a expliqué la sociologue Corinne Gendron, spécialiste en éthique sociale et en environnement, également membre du comité.

Elle s'est empressée d'ajouter que le comité n'avait aucune intention d'apaiser l'opinion publique. «Ce n'est pas du tout de rendre l'industrie acceptable - là n'est pas notre rôle. Notre rôle est de comprendre s'il y a moyen d'avoir une acceptabilité sociale, et à quelles conditions, le cas échéant.»

Le comité a également décidé de porter une plus grande attention aux impacts de cette activité sur l'industrie agricole, estimant qu'il faut déterminer si une exploitation peut avoir un effet, par exemple, sur la qualification des cultures biologiques ou sur la production animale.

Le comité, créé en mai 2011, dispose d'un budget de 7 millions $, dont environ 4 millions $ seront consacrés aux études à venir.



Il est formé d'experts indépendants de plusieurs disciplines. Surtout, il est indépendant de l'industrie pétrolière, a précisé M. Joly.

«Il n'y a pas d'action directe de l'industrie dans la réalisation du plan», a-t-il indiqué, précisant que l'industrie serait consultée - au même titre que les municipalités et les citoyens - afin d'obtenir de l'information et valider certaines hypothèses.

«(Les promoteurs) n'ont pas un rôle direct dans l'évaluation environnementale stratégique. Ils ne sont pas partie à la réalisation de nos travaux. Certains travaux seront confiés à contrat, soit à des universités ou soit à des firmes de consultants, mais ce n'est pas l'industrie qui va les réaliser.»